Conduite à tenir devant une infection HPV persistante
LA PHYSIOPATHOLOGIE DU CANCER DU COL EST UNE VALSE À 3 TEMPS
- La rencontre, le plus souvent lors des premières caresses dans la sphère sexuelle, avec un ou plusieurs des 15 Papillomavirus à haut risque(HPV-HR), les 16,18,31,33,45,52,58 étant les plus oncogènes,
- Une immunité naturelle insuffisante vis à vis de ces virus,
- Un dépistage absent ou inadéquat.
Les virus HPV–HR profitent d’une brèche de l’épithélium cervical, le plus souvent au niveau de la jonction, pour infecter les couches basales de l’épithélium : Il s’agit d’une infection latente puis productive caractérisée par la présence de koïlocytes et se traduisant au maximum en cytologie ou en histologie par une lésion de Bas grade.
Beaucoup plus rarement lorsque l’ADN viral s’intègre à l’ADN cellulaire, apparaissent mitoses et anomalies architecturales, conduisant à une lésion pré-cancéreuse : la lésion est alors devenue transformante et se traduira en cytologie et en histologie par une lésion de haut grade qui doit impérativement être dépistée et traitée.
Ce passage au stade de lésion transformante n’est pas systématique ni inéluctable : L’infection productive est le plus souvent transitoire et la clairance virale se produit avant 30 ans mais 10 à 15 % des femmes ne réussissent pas à clairer naturellement leur infection HPV : 4 % d’entre elles, en population générale, se dirigeront vers une lésion transformante mais pour la plupart des femmes l’infection productive peut rester tout simplement latente de nombreuses années.
L’excellente Valeur Prédictive Négative (VPN) du Test HPV-HR est à l’origine des dernières recommandations de l’HAS depuis 2019 :
- Le test HPV est plus sensible que la cytologie (90% versus 75 %),
- Le test HPV du fait de son excellente VPN assure une protection de 5 à 7 ans, ce qui permet d’allonger l’intervalle de dépistage à 5 ans chez les femmes HPV négatives,
- Ne sont pas concernées par ce dépistage les immunodéprimées, les femmes non suivies régulièrement, les femmes présentant des métrorragies inexpliquées et pour les femmes ayant été traitées d’une lésion de haut grade, l’intervalle de dépistage est fixé à 3 ans,
- Le test HPV manque de spécificité d’où un risque d’inflation des situations anxiogènes : Présence d’HPV- HR sans lésion précancéreuse notoire,
- Le dépistage par test HPV ne spécifie pas la recherche du type mais on sait que l’infection persistante par HPV 16 augmente le risque d’apparition d’une lésion de haut grade (15 à 18 % de risque de CIN3 en cas de Portage d’HPV 16 persistant). La vigilance dans le suivi est alors particulièrement nécessaire mais il faut souligner que le passage à une lésion de haut grade n’est pas inéluctable.
C’est la persistante de l’infection avec un même HPV qui est le principal facteur de risque d’apparition d’une lésion de haut grade :
Avec les recommandations actuelles qui n’imposent que les « trousses cocktail » détectant indifféremment une quinzaine de types, on ignore quel est le virus détecté, il est donc impossible de conclure avec certitude à une persistance virale certaine.
Cela souligne l’intérêt du triage par un test complémentaire, la cytologie, qui est un test très spécifique :
- En cas de cytologie anormale la colposcopie permettra de dépister une éventuelle lésion nécessitant une prise en charge,
- En cas de cytologie normale ASCUS + on vérifiera simplement à un an le facteur de risque que représente la persistance de l’infection HPV :
Si le test HPV-HR à 12 mois s’est négativé, il s’agissait probablement d’une exposition très récente, l’infection a été clairée en moins de 12 mois, il n’y aura pas d’indication de colposcopie,
Si le test HPV-HR persiste positif : la colposcopie sera alors l’outil de triage. Cette colposcopie ne révèlera souvent qu’une image non péjorative avec histologie de Bas grade.
L’INCa depuis 2016 recommande d’ailleurs de ne pas traiter les lésions de Bas grades histologiques à jonction bien suivies avant au minimum 24 mois de suivi.
En cas d’infection HPV-HR ou Bas grades persistants il faudra donc savoir RASSURER et dans le même temps expliquer la notion de SUIVI PROLONGÉ de cette infection latente, simplement productive.
Ce suivi prolongé sera assuré par une alternance de Test HPV +/- Cytologie +/- Colpsocopie afin de ne pas risquer d’ignorer le passage éventuel à une lésion transformante correspondant alors à une réelle lésion pré-cancéreuse nécessitant prise en charge.
La situation qui peut être ressentie comme anxiogène de test HPV positif sans lésion précancéreuse notoire est le prix à payer pour un dépistage qui ne verra plus les redoutables faux négatifs de l’ancien dépistage par cytologie.
Dans l’avenir de nouveaux outils permettant un meilleur ciblage du risque d’apparition d’une lésion de haut grade passera probablement par la Méthylation, le séquençage des HPV, la génétique… ?
Affaire à suivre….
Hélène Borne, Paris 8ème
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