LA CONTRACEPTION HORMONALE OESTRO-PROGESTATIVE A ÉTÉ ENTACHÉE DE RISQUES THROMBOEMBOLIQUES DU FAIT EN PARTICULIER DE L’UTILISATION D’UN ŒSTROGÈNE ARTIFICIEL, L’ÉTHYNYLESTRADIOL. DEPUIS QUELQUES ANNÉES EST APPARU L’ESTRADIOL, DIT NATUREL, POUR LEQUEL LA DERNIÈRE PUBLICATION FINLANDAISE MONTRE QU’IL N’Y A PLUS D’AUGMENTATION DU RISQUE THROMBOEMBOLIQUE VERSUS POPULATION NON TRAITÉE. ARRIVE UNE NOUVEAUTÉ UTILISANT UN ŒSTROGÈNE FŒTAL. AUTRE NOUVEAUTÉ MAJEURE, DANS UN AUTRE DOMAINE : L’APPARITION D’UN NOUVEAU PRODUIT ANTI-GONADOTROPE (ANTAGONISTE DE LA GNRH) PER OS, NON STÉROÏDE, QUI PERMET DE BLOQUER LE FONCTIONNEMENT OVARIEN.
LA CONTRACEPTION COMBINÉE ORALE
Intervention de Lorraine Maitrot-Mantelet. Unité de Gynécologie Endocrinienne, Hôpital Port Royal, Paris.
La première contraception approuvée par la FDA date de 1960. Dès 1967, les premières études épidémiologiques montrent une élévation des risques de thromboses artérielles et veineuses. Ultérieurement l’introduction des progestatifs de 2ème et 3ème génération permet de nouvelles associations avec diminution des doses d’éthynylestradiol (EE), cependant le risque thrombo-embolique persiste. Après les années 2000, les voies extradigestives apparaissent comme mode d’administration (patch, anneau). Ceci ne modifi e pas les risques thrombotiques. Au début des années 2010, les premières associations à base d’estrogènes bio-identique sont disponibles.
Ces évolutions des pilules ont permis de diminuer le risque thromboembolique du fait de la baisse des doses d’éthynil estradiol avec utilisation de progestatifs moins androgéniques et parfois même anti-androgéniques. L’équilibre hormonal conféré par ces associations déterminent le climat hormonal qualifi é d’estro androgénique et non estroprogestatif. Ce climat estro-androgénique se mesure par le taux généré de SHBG protéine porteuse des stéroïdes sexuels. Le taux de cette Sex Hormone Binding Protein, est le marqueur intermédiaire du risque veineux. Plus le taux de SHGB est élevé, plus l’impact estrogénique hépatique est élevé, plus le risque augmente.
On dispose de nombreux progestatifs non ou peu androgéniques, qui ont même parfois une activité antiandrogénique comme l’acétate de chlormadinone, l’acétate de cyprotérone, l’acétate de nomégestrol, le diénogest et la drospirénone,.
De nombreux changement hormonaux, physiologiques comme la grossesse mais aussi induits par un traitement hormonal peuvent dans la vie d’une femme provoquer un accident thromboembolique veineux. C’est un évènement rare mais grave.
Avant de prescrire une pilule il faut identifi er les facteurs de risque veineux en interrogeant les patientes (antécédents familiaux (peu connus des jeunes patientes) ou personnels mais aussi âge, surpoids, …).
Il est possible afi n de tenir compte de ces risques mais du terrain de chaque patiente d’utiliser diff érentes générations de progestatifs, mais aussi de varier les doses d’éthynylestradiol , et d’utiliser d’autres molécules estrogéniques (estradiol, valérate d’estradiol, estétrol, …).
Le risque veineux dépend du type de progestatif, ainsi les progestatifs androgéniques en diminuant le climat estrogénique diminuent le risque de thrombose veineuse.
Les études épidémiologiques montrent que les combinaisons lévonorgestrel + EE ou norgestimate + EE augmentent moins le risque thromboembolique veineux et de ce fait doivent aujourd’hui être prescrites en première intention. Par ailleurs ces études épidémiologiques démontent qu’en diminuant la dose d’EE le risque diminue, mettant ainsi en avant qu’il n’est pas avantageux d’utiliser des concentrations trop fortes en EE. Les contraceptions par patch et anneau sont équivalentes aux contraceptions de 3ème génération en termes de risque de thrombose veineuse.
L’autre façon de modifier le climat hormonal est de diminuer l’impact estrogénique hépatique en changeant de type d’estrogène. L’utilisation d’un progestatif androgénique perd alors de son intérêt.
Ces nouveaux contraceptifs commercialisés sont les suivants :
– 17 β estradiol 1,5 mg + acétate de nomégestrol 2,5 mg (24 cp actifs + 4 placébos) : schéma monophasique.
– Valérate d’estradiol + diénogest (26 cp actifs + 2 placébos) : schéma quadri phasique.
Les études montrent qu’il n’y a pas de diff érence signifi cative sur l’évolution du taux de SHBG par rapport aux 2èmes générations. Les marqueurs intermédiaires comme le taux de SHBG sont rassurants. Il en est de même avec les marqueurs type fragment 1 et 2 de la prothrombine et la RPCA, ce qui permet d’espérer que le risque devient équivalent aux contraceptifs contenant éthynil estradiol lévonorgestrel (seconde génération) ou moindre. Récemment, des études épidémiologiques ou de cohorte le confirment.
La dernière-née de ces nouveaux contraceptifs est l’association estétrol 15 mg + drospirénone 4 mg (24 cp actifs + 4 placebos) : schéma monophasique, AMM en mai 2021, commercialisée en France depuis octobre 2021. L’estétrol est un estrogène natif ou naturel synthétisé exclusivement à partir du foie fœtal qui vient de l’hydroxylation de l’estradiol et de l’estriol. D’un point de vue pharmacocinétique, l’estétrol a une bonne biodisponibilité orale, n’est pas métabolisé en estrogènes actifs, ne se lie pas à la SHBG et a une demi-vie longue donc une bonne effi cacité contraceptive. Selon le profi l pharmacodynamique, c’est un NEST (fi rst native estrogene with specifi c action in tissues).Son intérêt majeur est qu’il n’augmente pas les taux de SHBG et a un eff et mineur sur les protéines hépatiques habituellement perturbées par les estrogènes classiques administrés per os. Il est bien entendu nécessaire de l’associer à un partenaire progestatif : la drospirénone non androgénique a été choisie car il n’est pas nécessaire de contre balancer l’effet estrogénique hépatique. Cette dernière a des activités anti-minéralocorticoïdes, antiandrogéniques et anti-gonadotropes. L’association des deux molécules ne crée pas d’augmentation significative du taux de RPCA contrairement aux autres associations en particulier contenant de l’éthynil estradiol qui ont un impact sur ce paramètre de l’hémostase. D’autre part, l’effet de cette association est neutre sur les fragments de thrombine marqueur de l’activation de la coagulation.
L’efficacité contraceptive est bonne puisqu’il y a blocage de l’ovulation, avec une tolérance à l’oubli qui va jusqu’à 24h (due à la demi-vie longue de la drospirénone). Un retour d’ovulation est observé après l’arrêt du traitement dans les 15 à 19 jours. L’indice de Pearl est excellent.
La tolérance et les facteurs de risques artériels (migraine, HTA, dyslipidémie troubles de la glyco régulation, …) ont été évalués. L’association montre un impact limité sur les paramètres lipidiques, un impact neutre sur le métabolisme et la tolérance glucidique. Le profi l d’hémorragie de privation est intéressant puisque plus de 90% des femmes ont des saignements réguliers lors de la fenêtre sans hormone. Les saignements non programmés (spotting) sont réduits. L’acné peut être un eff et non désirable mais non grave dans un faible pourcentage de patientes. Une faible sensibilité et tension mammaire ont aussi été rapportés.
La contraception oestroprogestative combinée est la contraception de première intention si les contre-indications et facteurs de risque ont été éliminés.
PERSPECTIVES DANS LA PRISE EN CHARGE MÉDICAMENTEUSE DES FIBROMES UTÉRINS
Intervention de Christian Jamin, Paris.
Il existe un certain nombre de pathologies qui se développent sous l’influence des estrogènes. La théorie du seuil oestrogénique est simple. L’utilisation d’un anti-gonadotrope permet d’eff ondrer la production d’estrogènes. Toutefois pour éviter les carences estrogéniques, il est nécessaire d’ajouter une quantité suffi sante d’estrogènes pour protéger la patiente de l’ostéoporose, de la sécheresse vaginale…, mais pas trop élevée quand même pour ne pas entretenir la maladie de départ. Cette théorie dite du « seuil estrogénique » existe en particulier dans les domaines du fi brome et de l’endométriose.
Les fi bromes sont fréquents chez les femmes et représentent une problématique de santé publique majeure. Ils sont symptomatiques pour le tiers d’entre eux. Les fi bromes symptomatiques doivent être traités soit s’ils sont de dimension trop importante soit lorsqu’ils induisent des saignements pendant ou en dehors des règles ou dans certains cas d’infertilité. La stratégie thérapeutique consiste à donner en première intention un traitement médical (hormones en particulier progestatives, antalgiques, anti-infl ammatoires, anti-fi brinolytiques, et donc plus récemment analogue GnRH avec add back pour le confort et la santé des patientes).
La grande nouveauté est l’arrivée sur le marché d’un antagoniste GnRH utilisable per os : le relugolix. C’est un composé qui se lie au récepteur du GnRH et qui bloque son eff et. Il est utile dans le traitement des hypertrophies prostatiques, et chez la femme dans le fi brome et les endométrioses en l’associant à une add back therapy (1 mg estradiol + 0,5 mg norethindrone acetate). La dose est de 1 comprimé par jour sans limitation de durée. C’est une thérapie combinée qui a eu son AMM pour la prise en charge des fi bromes en juillet 2021. L’effi cacité et les eff ets secondaires de cet antagoniste oral sont identiques à ceux des analogues injectables. La balance bénéfi ce-risque est favorable pour cette nouvelle thérapie combinée. Les études américaines Liberty 1 et 2 démontrent l’intérêt de cette combinaison.
Existent bien entendu aussi d’autres traitements de ces fi bromes comme le traitement chirurgical (avec risque faible mais existant de mortalité et morbidité) et la radiologie interventionnelle. L’embolisation est peu invasive mais montre un risque d’infertilité et est contre-indiquée si la patiente est en désir de grossesse.
Compte-rendu écrit par Cindy Patinote