Nous avons vu dans le précédent numéro de GENESIS que la loi de santé du 26 janvier 2016 (1) organise un Système National des Données de Santé (SNDS) qui offre un accès à de nombreuses données. Un véritable Grisbi qui dessine une (la ?) médecine de demain.
D’où viennent les données ?
Le SNDS rassemble les données issues :
- des systèmes d’information des établissements de santé (PMSI),
- les données du Système national d’information inter-régimes de l’assurance maladie (SNIIRAM),
- les données sur les causes de décès (base CépiDC de l’Inserm),
- les données médico-sociales du système d’information des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH),
- un échantillon représentatif des données de remboursement par bénéficiaire transmises par des organismes d’assurance maladie complémentaire et défini en concertation avec leurs représentants.
Quelles données ?
On y trouve des données de nature médicoadministratives, par exemple (2) :
- des informations relatives aux bénéfi ciaires de soins et de prestations médico-sociales : sexe, mois et année de naissance, rang de naissance, lieu de résidence (sans adresse), ALD, maladies professionnelles, informations relatives au décès (lieu, causes et circonstances…) ;
- des informations relatives à la prise en charge associée à chaque bénéfi ciaire : nature des actes, biens et services, codes des actes médicaux, des dispositifs médicaux, actes de pharmacie, biologie et de transport sanitaire, date des soins, date de grossesse, etc. ;
- des informations relatives aux professionnels de santé : spécialité, numéro d’identifi cation, établissement de rattachement, sexe, date de naissance, etc.
Dans ses propositions pour 2019 (3), l’Assurance Maladie recommande de valoriser les données du SNDS pour construire des indicateurs de qualité et de pertinence (proposition n° 12) et d’enrichir le périmètre des données du SNDS (proposition n° 28).
Comment accéder au Grisbi ?
La demande d’accès aux données est formulée auprès de l’INDS (Institut national des données de santé) : www.indsante.fr
La procédure standard d’accès aux données est examinée en 2 à 4 mois environ avec intervention d’un comité d’experts, le CEREES (4) qui examine la méthodologie, la nécessité du recours à des données à caractère personnel, la pertinence de ces données par rapport à la finalité du traitement, la qualité scientifique du projet, le cas échéant des recommandations de modifications à apporter au projet. Pour la recherche, un avis favorable d’un comité de protection des personnes s’impose.
Il existe aussi une procédure d’accès simplifié aux données agrégées et à l’échantillon généraliste des bénéficiaires (EGB). L’EGB est un échantillon au 1/97e de la population française (600 000 bénéficiaires) qui comprend un ensemble de parcours individuels de soins. Il est considéré comme représentatif de la population en matière d’âge et de sexe. L’accès peut être approuvé par le SNDS dans un délai de 15 jours à compter de la réception d’un dossier complet (5).
Plus généralement, il existe des méthodologies de référence concernant le traitement (accès, utilisation…) de certaines données de santé, telles que celles issues du PMSI (6). Leur respect permet de mettre en oeuvre certaines recherches sans plus avoir à recueillir une autorisation de la CNIL.
L’émergence de nouveaux outils et de nouveaux modèles
Les données existent et les enjeux sont énormes, notamment en termes de santé publique, et demain d’intelligence artificielle. Mais dès aujourd’hui, s’agissant de ces données massives de santé, la Cour des comptes souligne que « leur exploitation reste encore insuffisante (7) ». Pour les opérateurs, les difficultés semblent porter sur les modalités d’accès aux données, leur exploitation et leur valorisation.
Ainsi, le Big data et l’open data conduisent à l’émergence de nouveaux modèles, notamment via des plateformes cloud alimentant plusieurs services. Ils visent à répondre à des besoins très diversifiés par le recueil, le traitement et l’utilisation de données (études cliniques, logiciels d’aide à la prescription, gestion du cabinet pour les libéraux…).
C’est aussi l’émergence de nouveaux outils d’évaluation de la qualité des soins. L’utilisation des données électroniques « permet aussi de mieux mesurer la qualité des soins et les résultats obtenus (en disposant) d’un instrument de connaissance des performances du système de santé, d’un dispositif d’enregistrement et d’échange d’informations utiles à la qualité des soins, mais aussi d’un moyen de stimuler les efforts des prestataires de santé, ceux-ci pouvant comparer les résultats obtenus (8). »
Thierry Casagrande, Avocat, DPO tc@ThierryCasagrandeAvocats.fr
RÉFÉRENCES
1. C’est l’article 193 de la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 qui instaure le Système national des données de santé (SNDS). Le Chapitre V de la loi s’intitule : « Créer les conditions d’un accès ouvert aux données de santé ». La loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 institue un comité d’audit du SNDS pour des raisons de sécurité et de protection des données.
2. Art. R. 1461-4.-I du Code de la santé publique.
3. Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses Propositions de l’Assurance Maladie pour 2019 Juillet 2018 -Rapport – au ministre chargé de la Sécurité sociale et au Parlement sur l’évolution des charges et produits de l’Assurance Maladie au titre de 2019 (loi du 13 août 2004).
4. Comité d’Expertise pour les Recherches, les Etudes et les Evaluations dans le domaine de la Santé.
5. Délibération n° 2018-134 du 12 avril 2018, CNIL.
6. Exemple : délibération no 2018-256 du 7 juin 2018 portant homologation d’une méthodologie de référence relative aux traitements de données nécessitant l’accès par des établissements de santé et des fédérations aux données du PMSI et des résumés de passage aux urgences (RPU) centralisées et mises à disposition sur la plateforme sécurisée de l’ATIH (MR 005).
7. Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, oct. 2018, p. 166.
8. Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, oct. 2018, p. 158.
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