Cette étude ouverte analyse l’effet d’un voile intravaginal associé à un traitement topique intravaginal pour limiter les fuites liées à ces traitements et améliorer le confort des patients pendant le traitement.
Chaque année des centaines de milliers de femmes utilisent des produits intra-vaginaux soit en prescription soit en achat spontané : ovules, capsules, comprimés, gélules, crèmes, et autres gels vaginaux pour diverses pathologies (infections, sécheresse locale, troubles de la trophicité…). A titre d’exemple, dans son rapport de 2014, l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé, rapporte un volume de ventes de 8 millions de boîtes d’éconazole pour l’année 2013¹….
L’efficacité de ces produits est le plus souvent au rendez-vous, mais il suffit de parcourir sur les réseaux sociaux les forums d’utilisatrices pour s’apercevoir que quelques désagréments accompagnent l’utilisation de ces produits et, en premier lieu, le fait que ces ovules, gels et autres « coulent »… Nombre de femmes rapportent l’inconfort au quotidien engendré par ce phénomène qui les obligent à porter des protections pendant la journée et parfois même la nuit. Au mieux, ces fuites ne posent qu’un problème vestimentaire (d’où l’emploi de protections pour éviter la souillure des vêtements). Au pire, les produits qui s’extériorisent de la cavité vaginale créent des irritations vulvaires ou périnéales lors des contacts prolongés. Des conseils d’utilisation simples limitent ce phénomène : insérer le produit vaginal de préférence le soir en position allongée et rester allongée plusieurs minutes. Malgré tout, la plainte est récurrente chez nos patientes et la revendication d’efficacité thérapeutique ne doit pas faire négliger le confort au quotidien de ces femmes.
Un dispositif appelé V-Veil se propose de limiter ces fuites lors de l’utilisation des traitements topiques vaginaux. Afin de démontrer cet objectif, une étude d’acceptabilité et de tolérance a été menée sur 20 patientes volontaires dans un Centre de Recherche Clinique de l’Ile Maurice supervisé par un laboratoire d’Etudes Cliniques français certifié ISO 9001.
■ 1. Protocole
Il s’agissait d’une étude ouverte. Chaque patiente étant son propre contrôle.
20 patientes atteintes soit d’une vaginite bactérienne (n=11) soit d’une vaginite candidosique (n=9) ont été traitées par des capsules gynécologiques (capsules molles) associant antibactériens et antifongique soit pendant 6 jours (vaginites bactériennes) soit pendant 12 jours (vaginites candidosiques).
Pendant les premiers jours de traitement (3 jours pour les vaginites bactériennes et 6 jours pour les mycoses), les patientes ont utilisé les capsules gynécologiques seules.
Pour la fin du traitement (c’est-à-dire 3 ou 6 jours selon l’étiologie), elles devaient introduire la capsule gynécologique avec le voile grâce à l’applicateur.
L’efficacité du voile a été évaluée par les patientes par comparaison du volume de sécrétions vaginales observées avec la capsule gynécologique seule ou avec le voile vaginal.
■ 2. Résultat
L’âge moyen des patientes de l’étude était de 34 + 2 ans (minimum 19 ans et maximum 52 ans).
a. Résultats avec capsule gynécologique seule
- 70 % ont trouvé l’insertion de la capsule facile.
- 85 % ont rapporté un écoulement vaginal dès le lendemain de la première application et 75 % d’entre elles ont jugé cet écoulement désagréable.
b. Résultats avec capsule + voile
- 80 % des patientes ont trouvé l’utilisation du V-Veil aisée.
- 35 % des patientes ont rapporté un écoulement vaginal après l’application.
- 25 % des patientes se sont déclarées gênées par la présence du voile.
- Pour 80 % des patientes, V-Veil peut favoriser une meilleure observance du traitement.
c. Jugement des patientes sur le V-Veil
- 70 % des patientes préfèrent l’utilisation de V-Veil à l’application de la capsule vaginale seule.
- Pour 85 % d’entre elles, le voile leur permet d’appliquer le traitement dans la journée (plutôt que le soir) sans crainte d’écoulements désagréables.
- Enfin 90 % des patientes recommanderaient le V-Veil aux femmes nécessitant un traitement par ovule, crème ou gel vaginaux.
■ 3. Discussion
La qualité de vie de nos patientes est un élément à prendre en considération dans la prescription de traitements locaux vaginaux à plusieurs titres :
• Tout d’abord pour le confort de la femme pendant le traitement : l’existence de pertes vaginales liées au traitement venant s’additionner aux leucorrhées pathologiques obligent parfois les patientes à utiliser des protections périodiques et aggravent l’irritation locale.
• Ces écoulements « iatrogènes » peuvent inciter la patiente à écourter le traitement. On sait que cette mauvaise observance est une source de récidive des pathologies. Cette constatation est surtout sensible chez les patientes nécessitant des traitements prolongés par ovules, crèmes ou gels vaginaux au cours des vaginites atrophiques par exemple.
A ce titre, l’étude ci-dessus apporte des éléments de réponse positifs avec une perception très positive des patientes vis-à-vis de voile vaginal (35 % de femmes rapportant un écoulement vaginal avec le voile vs 85 % avec la capsule seule). On peut, cependant regretter que l’étude n’ait pas été menée en « cross-over », avec une partie des patientes utilisant le V-Veil en première partie de traitement et la capsule gynécologique seule en fin de traitement. En effet, une partie de la diminution des leucorrhées peut également être attribuée à l’efficacité du traitement et à la disparition progressive de l’infection. Néanmoins, les patientes notent une diminution rapide des écoulements vaginaux dès le 1er soir d’application avec le voile et cette diminution ne peut être entièrement attribuée à une disparition soudaine de l’infection.
La facilité d’application du V-Veil est également un point très positif de même que sa très bonne tolérance (75 % des femmes ont déclaré l’avoir très bien toléré).
Il faut également préciser que la diffusion de principes actifs contenus placés dans le voile a également été étudiée car il est fondamental que ce dispositif ne modifie pas l’efficacité des traitements. Pour cela, les concentrations extérieures de deux traceurs introduits dans le voile ont été comparées à celles d’un échantillon témoin après 30 minutes, 1 et 2 heures. Dès 30 minutes, la diffusion des traceurs avoisine les 70 % de la valeur théorique et cette concentration persiste jusqu’à la fin de l’étude à 2 heures, démontrant ainsi que ce dispositif ne modifie pas l’efficacité thérapeutique.
Au total, cette étude permet d’envisager un mode d’administration innovant de produits vaginaux répondant à une exigence légitime de nos patientes concernant leur qualité de vie en cours de traitement. Des études portant sur un plus grand nombre de patientes et sur d’autres types de produits (crèmes, gels..) devraient confirmer l’utilité de ce mode d’administration.
Jean-Marc Bohbot
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts pour cet article
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