Incontinence urinaire, rééducation périnéale du post-partum, implants ou bandelettes, lasers… Le Pr Marès fait le point sur les différentes thérapeutiques disponibles en pathologie périnéale.
RÉÉDUCATION PÉRINÉALE
Est-il justifié et utile que toutes les françaises aient une rééducation périnéale remboursée en postpartum même si elles n’ont pas d’incontinence d’urine ?
Non, mais il faudrait un vrai examen pelvien du post-partum ce qui n’est pas fait dans la plupart des cas. Concernant cette question, il serait important que les femmes puissent bénéficier pendant la grossesse, et si possible avant, d’un examen pelvien leur permettant de mieux connaitre leur sangle pelvi-périnéale et comment s’en servir et par ailleurs qu’elles puissent bénéficier d’une information qui devrait avoir une place spécifique dans le cadre de la préparation à l’accouchement. Il est intéressant de rappeler ici que lors de la mise en place du programme obstétrical pour l’entretien du 4ème mois de la grossesse tout ce qui touchait le périnée n’avait pas été cité dans le programme national…! Enfin sur le plan pratique il serait utile d’envisager une éducation à la connaissance de la sangle pelvi-périnéale qui pourrait être faite sans examen gynécologique et mis à disposition des jeunes filles pendant l’adolescence.
Les procédures de rééducation sont-elles toutes performantes (aux doigts, auto rééducation à domicile par kit remboursé acheté en pharmacie, système de stimulation périnéale externe (sans sonde vaginale)…
Elles ont toutes une efficacité sinon elles en seraient plus utilisées… Mais il y a quelque conditions :
1) que le professionnel maîtrise la technique ;
2) que cette technique soit bien acceptée par la femme ;
3) que le professionnel soit capable de proposer une autre solution si la première ne convient pas ou d’adresser la patiente à un autre collègue…
Dans un second temps, il faut parfois associer des techniques qui justifient des formations multiples des professionnels. Enfin il faut que ces techniques soient intégrées dans le schéma corporel de la femme pour que ce reflexe devienne automatique et permette de maintenir les résultats à long terme. Il est important de souligner que dans ces éléments des techniques de rééducation, deux notions doivent être prises en compte :
1) la possibilité pour la femme de supporter une rééducation par voie vaginale. C’est-à-dire d’avoir une trophicité de bonne qualité et de ne pas avoir de problème douloureux ce qui est trop souvent négligé et non recherché. Et dans un deuxième temps de chercher la technique la mieux acceptée par la patiente qui peut être une technique sans contact périnéal voire sans sonde intra-vaginale.
2) Enfin de développer des techniques d’auto-rééducation une fois que la patiente a eu une formation suffisante.
CRISES DES « IMPLANTS FILES »
Expliquez-nous la « crise des implants ». Est-elle justifiée?
Il faut savoir que les problèmes liés aux prothèses sont connus des professionnels et qu’un registre a été mis en place depuis plusieurs années (coordonné par le Pr Tayrac au CHU de Nîmes). Ceci permet de garder une vigilance contre des pratiques excessives de prescription de chirurgie parfois dès les premières consultations avant d’avoir testé des traitements médicamenteux et/ou de rééducation. Ces techniques doivent être systématiquement proposées avant toute chirurgie. Toutefois la crise des implants est tributaire d’un journalisme à la recherche de scoops et de groupes de pression qui veulent présenter leurs problèmes comme majoritaires et/ou comme une négligence alors que ce n’est ni l’un ni l’autre. Mais la remontée de ces problèmes est par contre indispensable pour valider les techniques et savoir parfois les abandonner si leurs effets sont réellement majoritairement négatifs. Dans ce cas le travail de surveillance des sociétés savantes et des associations d’usagers peuvent permettre de peser le bénéfice et le risque, d’adapter les pratiques et quelquefois d’en arrêter l’utilisation. Il faut savoir d’ailleurs que toute technique nécessite une évaluation étendue dans le temps car il est difficile d’avoir des résultats à long terme tant qu’une technique n’est pas utilisée depuis longtemps… ! Toutefois le vrai problème repose sur la qualité du diagnostic et le choix thérapeutique et peut-être aussi… De quotas qui semblent se mettre en place pour que des structures puissent continuer certaines activités opératoires.
Quelle est à ce sujet la situation en France actuellement alors que certains pays ont décidé un moratoire?
La France a une attitude équilibrée avec un choix d’indications cadrées avec des recommandations du CNGOF et des sociétés savantes et donc le moratoire en lui-même ne parait pas utile. Il serait surtout utile d’appliquer les recommandations et de les évaluer… Enfin la question ne se pose pas en termes d’alternative à l’implant ou au TVT ou TOT… Si l’indication de l’implant ou de la bandelette sous urétrale se justifie. Par contre avant de proposer un implant, il faut tester la rééducation, le traitement médical, qui peuvent parfois permettre de reculer une opération ou d’améliorer les résultats quand elle est devenue nécessaire. Enfin nous disposons de nouvelles techniques qui nécessitent toutefois des évaluations telles les LED, la radiofréquence, le laser qui peuvent être proposés dans ces indications et repousser ou éviter une intervention.
Y a-t-il des alternatives aux TVT et TOT?
Le TVT ou le TOT sont de très bonnes techniques dès que l’indication est posée, après avoir mis en place toutes les séquences thérapeutiques préalables : médicales, rééducation, techniques locales, pessaire, Deeven, laser, LED, radiofréquence.
LASERS VAGINAUX
Que penser du « Warning » de la FDA et de l’émoi actuel de certains médecins français qui crient aux « apprentis sorciers » ?
Le Warning de la FDA et de l’ICS sont utiles et nécessaires. Ils confirment certaines pratiques trop excessives avec des lésions de type brûlures qui ont pu être retrouvées grâce justement aux techniques de surveillance par registre… Ceci confirme l’importance de respecter les indications, de développer des formations pour les professionnels tels que les diplômes de Montpellier-Nîmes et de Créteil… et de suivre les propositions thérapeutiques faites par les sociétés savantes telle que le GRIRG, le CNGOF.
Les lasers sont-ils une nouvelle alternative aux thérapeutiques actuelles ?
Le laser, la radiofréquence, les LED sont des techniques particulièrement efficaces pour traiter, de façon complémentaire au traitement médical, le syndrome génito-urinaire, la sécheresse vaginale, et la vaginose. Les résultats des équipes italiennes et au niveau mondial ont montré des réponses satisfaisantes dans près de 80% des cas de syndromes génitaux urinaires. Au niveau des traitements en incontinence urinaire ou prolapsus, des études sont en cours.
Proposer ces techniques implique 4 conditions :
1) Avoir déjà testé les traitements médicaux et rééducatifs classiques
2) Avoir été formé à ces nouvelles techniques
3) Informer les patientes sur les résultats escomptés mais leur préciser clairement que nous n’avons pas de recul sur ces techniques
4) Enregistrer les patientes traitées dans un registre national qui permettra de suivre les résultats de ces techniques. (Registre proposé par le CHU de Nîmes : OTTAPE).
Ces techniques sont promises à un avenir certain mais nécessitent une évaluation dans le cadre des recherches cliniques en cours.
PR PIERRE MARÈS
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