Comment votre exercice a-t-il évolué au cours des 10 dernières années ?
Il y a 11 ans, j’ai fait le choix de fermer mon cabinet libéral pour me consacrer totalement à mon activité hospitalière. Déjà praticien hospitalier à mi-temps, j’ai obtenu un poste temps plein de gynécologie médicale et médecine de la reproduction dans un service hospitalier universitaire de Gynécologie Obstétrique.
Il me semblait alors indispensable de m’investir davantage dans la reconnaissance et la mise en place de la filière du DES de Gynécologie Médicale au sein de l’activité Gynéco Obstétricale.
De 2007 à 2011 en tant que présidente de la Fédération Nationale des Collèges de Gynécologie Médicale mon objectif a été de démontrer l’intérêt de la collaboration gynécologues médicaux (GM) et gynécologues obstétriciens (GO) à l’hôpital et pour ce faire la nécessité donc d’en enrichir la filière.
Lors de ces dix dernières années mon activité professionnelle s’est modifiée avec un abandon de l’AMP, où la relève était assurée, pour une activité considérée comme moins noble : l’orthogénie et la prise en charge des femmes ménopausées.
Enfin j’ai vu avec tristesse, de façon exponentielle ces dernières années se dégrader la qualité de la médecine hospitalière par baisse des moyens.
Quelles sont selon vous les orientations futures de la gynécologie obstétrique ?
La génétique et l’intelligence artificielle prendront certainement beaucoup de place pour la prévention mais aussi dans l’efficacité thérapeutique.
Il faudra par contre beaucoup d’humanisme et d’éthique insuffisamment enseignés pour faire face à toutes les questions nouvelles qui se poseront du fait de l’évolution des connaissances.
La prise en charge oncologique sera certainement davantage médicale au détriment des actes chirurgicaux.
Quelle a été votre meilleure expérience professionnelle ?
Sans doute, il y a longtemps désormais fi n des années 80, mon activité au début l’Assistance Médicale à la Procréation et mes premiers prélèvements ovocytaires avec succès.
Aujourd’hui le nombre de jeunes GM, la qualité de leur formation et la synergie GM-GO dans l’amélioration de la prise en charge de la Santé des Femmes.
Quelle a été votre principale déception ?
La régression dans la prise en charge de la Santé des Femmes par la phobie des « hormones » qui a débuté en 2002 avec la WHI et sa réplique en contraception avec la « crise de la pilule » française de 2013 dont j’ai été une des victimes médiatiques.
L’ampleur de la désinformation des femmes due aux médias, aux « journalistes » et aux éditeurs âpres aux gains, aux réseaux sociaux et aux blogs.
Pire encore la défiance des femmes que nous devons désormais aux associations de patientes qui, loin de défendre la Santé des femmes, ne défendent que leur visibilité (Resist, SVH…) quitte à faire perdre l’accessibilité à d’éventuelles thérapeutiques fort efficaces pour d’autres.
L’abandon des femmes ménopausées par des médecins n’actualisant pas leur connaissance sur la balance bénéfices / risques du THM.
Quels sont vos espoirs ?
Pour les professionnels : un travail en complémentarité des GO, GM, MG et SF chacun dans son domaine de compétence et dans le respect mutuel.
Pour les patientes : l’acquisition d’une certaine maturité et d’un esprit critique vis-à-vis des informations « grand public » largement diffusées souvent à dessein commercial avec au mieux le retour de la confiance vis-à-vis de la science et de ceux qui ont fait vœu de les soigner.
Brigitte LETOMBE
Gynécologue, Lille
9 commentaires