QUAND, POURQUOI, COMMENT ET A QUI LE PRESCRIRIEZ-VOUS ?
La prescription d’un dispositif intra-utérin doit s’accompagner d’une information sur l’appareil et les éventuels effets secondaires. Il faut aussi avertir la femme des symptômes qui doivent l’amener à consulter rapidement.
La prescription d’un dispositif intra-utérin (DIU) ou d’un système intra-utérin (SIU) est devenue de plus en plus fréquente lors d’une consultation pour contraception. Cette prescription est faite dans deux circonstances un peu différentes : le plus souvent c’est la patiente qui demande un DIU, parfois c’est le praticien qui le propose.
La patiente demande un dispositif intra-utérin
Cette demande est souvent faite avec détermination, parfois de manière un peu hésitante, en particulier par les jeunes femmes, qui ont peur de se heurter à un refus. Toute demande doit être prise en considération, même chez des femmes jeunes et nullipares, la nulliparité n’est pas une contre-indication (HAS) aux DIU et SIU.
« Toute demande doit être prise en considération, même chez des femmes jeunes et nullipares, la nulliparité n’étant pas une contre-indication »
Avant de prescrire un DIU ou un SIU des explications précises doivent être données qui éviteront ensuite regrets et retraits prématurés. En effet, souvent la patiente vient avec des idées peu précises et même parfois erronées.
Il faut informer sur l’appareil
– Informer sur sa configuration (information commune aux DIU et SIU) au besoin en le montrant, sur son insertion en expliquant qu’il est placé dans la cavité utérine et non dans le vagin, comme nombre de patientes le croient, et que seuls des fils extrêmement fins sont dans le vagin.
– S’inquiéter aussi, si la patiente vit en couple, de la connaissance qu’a son partenaire des DIU. En effet, cette contraception n’est pas très bien connue des hommes, ce qui engendre des fantasmes (peur de se piquer) et peut amener le partenaire à demander le retrait du dispositif.
– Expliquer les différences entre les DIU porteurs de 380mm2 de Cu et les SIU porteurs d’hormones, détailler les avantages et inconvénients de chacun de ces dispositifs.
– Souligner que ces deux types de dispositifs intra-utérins empêchent la fécondation et ne sont pas abortifs. Dans le DIU, le cuivre fait perdre leur capacité de fertilisation aux spermatozoïdes, dans les SIU, le lévonorgestrel ferme le col utérin, empêchant les spermatozoïdes de le franchir, et modifie la muqueuse utérine.
Il faut souligner les avantages de la méthode
– Efficacité excellente (indice de Pearl de 0,52 pour DIU et 0,06 pour SIU(1)).
– Disparition d’un geste quasi-quotidien lors de la contraception hormonale orale et sa hantise de l’oubli ; disparition d’ailleurs de ces oublis qui entraînent une diminution notable de l’efficacité de cette contraception orale.
– Contraception dissociée de la relation sexuelle.
– Contraception mise place pour un temps long (DIU 10 ans et plus, SIU 5 ou 3 ans), qui peut être arrêtée très facilement avec possibilité de grossesse immédiate.
Cependant par prudence certains recommandent d’attendre le cycle suivant l’ablation du DIU ou SIU permettant ainsi l’évacuation de possibles restes de cuivre ou du progestatif(2).
Il faut prévenir des éventuels effets secondaires
– Douleurs au moment de la pose, assez variables d’une femme à l’autre mais plus importantes chez les nullipares(3). Il semble justifié de donner, chez des femmes anxieuses, un léger calmant ou un antispasmodique. Par contre, des publications font état de la non amélioration des douleurs par la prise d’anti-inflammatoires, 3/4h à 1 heure avant la pose(3), ou de misoprostol(4).
– Métrorragies et douleurs possibles dans les jours suivant la pose et parfois durant les premiers mois après celle-ci. La norme étant toutefois de retirer le DIU ou le SIU si ces symptômes se prolongent au-delà de 3 mois.
– Modification des règles. Pour les DIU, augmentation de leur abondance s’accompagnant parfois d’une dysménorrhée ; pour les SIU, survenue d’une possible aménorrhée, parfois souhaitée et faisant même choisir un SIU, mais parfois très mal perçue.
Il faut avertir des éventuels symptômes qui doivent amener la patiente à venir consulter rapidement.
– Fièvre et /ou douleurs pelviennes. Surtout si elles surviennent dans les 20 jours suivant l’insertion du dispositif.
Elles peuvent être dues à une infection génitale qui statistiquement est plus fréquente dans les jours suivant la pose. Mais toutes les études montrent cependant qu’elles ne sont pas augmentées par un DIU ou un SIU(5). Toutefois, chez des patientes ayant une vie sexuelle peu stable, la pose d’un DIU n’est pas recommandée par crainte d’une infection.
Faut-il faire un prélèvement systématique à la recherche de maladies sexuellement transmissibles avant la pose d’un DIU ou SIU ? De plus en plus d’études montrent qu’il est préférable de le réserver à des patientes à risques(6). Les recommandations de l’HAS vont dans le même sens.
– Modification des fils. Allongement qui peut correspondre à une descente du dispositif dans l’isthme ; disparition qui fait suspecter une possible perforation avec une migration du DIU dans la cavité abdominale. L’échographie permet de faire le diagnostic dans tous ces cas.
En effet, parfois, la perforation utérine passe inaperçue lors de la pose du dispositif et ne peut être découverte que quelques mois plus tard devant la disparition des fils. Ces perforations sont rares, 1,1/1 000 avec les DIU, 1,4/1 000 pour Mirena(2), légèrement plus fréquentes chez une patiente qui allaite.
– Aménorrhée chez une patiente porteuse d’un DIU
Il faut suspecter une grossesse, bien qu’elle soit extrêmement rare chez une patiente porteuse d’un DIU ou SIU (0,6/100, HAS). Il faut faire un HCG et se méfier d’une GEU qui est relativement plus fréquente chez une femme ayant un DIU.
Chez les patientes porteuses d’un SIU qui ont une aménorrhée, souvent seuls des signes sympathiques de grossesse attirent l’attention et doivent faire demander un dosage de HCG.
Le prescripteur se doit aussi de rechercher des contre-indications à un DIU ou un SIU.
Par un interrogatoire portant sur :
– Les règles : abondance, dysménorrhée éventuelle. Un DIU sera déconseillé si la patiente a des règles déjà abondantes ou très douloureuses car il y a un risque d’aggravation. Dans ces cas-là, un SIU sera conseillé car il diminue l’abondance des règles et la dysménorrhée.
– Les antécédents gynéco-obstétricaux : accouchements prématurés, FCS à répétition qui feront soupçonner une éventuelle malformation utérine, infection génitale antérieure, qui si elle est guérie depuis 3 mois, n’est pas une contre-indication à la pose d’un dispositif intra-utérin. Les antécédents de GEU ne sont pas pour l’OMS une contre-indication à un DIU, certains pensent qu’il serait préférable cependant d’orienter la patiente vers un autre moyen de contraception(6).
– Les antécédents médicaux. Pour le SIU, ce sont les mêmes contre-indications que pour les pilules progestatives.
Par un examen gynécologique
Il permettra d’évaluer :
– L’OE du col, parfois très rétréci par des interventions ou à peine visible chez certaines nullipares.
– La taille, la forme et la position de l’utérus. Cette évaluation est très empirique mais peut guider dans le choix de la forme (aucune étude n’a montré la supériorité d’une forme par rapport à une autre) et la taille du DIU, normal ou short, parfois un utérus très petit peut faire renoncer à un SIU.
Il permettra aussi de reconnaître l’existence d’un fibrome. Il faut vérifier par une échographie l’état de la cavité utérine. Si celle-ci est déformée, il faut renoncer à la pose d’un DIU ou SIU. Par contre, si le fibrome ne déforme pas la cavité, la pose d’un SIU est recommandée car celui-ci peut faire diminuer les ménorragies qui accompagnent les fibromes et parfois le fibrome lui même.
– De faire un frottis si nécessaire d’après les recommandations de l’HAS.
Mais dans certain cas, c’est le prescripteur qui le propose à la patiente
Ainsi :
– Un DIU ou un SIU, si des oublis fréquents de pilules contraceptives ont entraîné des grossesses non désirées,
– Un DIU, lorsqu’il existe une contre-indication à la contraception hormonale,
– Un SIU, en cas de règles abondantes (après avoir éliminé une pathologie requérant un autre traitement), d’endométriose. Dans ce dernier cas, il faut expliquer à la patiente que le port d’un SIU peut lui éviter des traitements plus lourds et même parfois une intervention.
Au terme de cette longue consultation généralement un consensus est trouvé entre une patiente bien informée et le prescripteur. Une prescription d’un DIU ou d’un SIU est faite.
Faut-il alors, si la patiente est dans la période adéquate pour la pose du dispositif (en principe entre le 4e et 14e jour du cycle, avant l’ovulation), le faire immédiatement ou attendre pour une décision plus réfléchie, au risque de la survenue d’une grossesse non désirée ? La réponse varie en fonction du degré de détermination de la patiente.
Enfin il est important que le prescripteur signale à la patiente
– Qu’une visite de contrôle doit être faite dans les mois suivant (HAS) la pose du DIU. Elle permettra d’évaluer la tolérance du DIU ou du SIU.
– Qu’en cas de problème, elle ne doit pas hésiter à consulter.
– Qu’une bonne tolérance du DIU ou SIU ne la dispense pas d’un suivi gynécologique régulier et de frottis.
Certes, il est tout à fait souhaitable que la patiente oublie son DIU ou SIU ce qui est souvent le cas, mais pas le suivi gynécologique ni la date de changement de son SIU !
Elisabeth Aubény – Association Française pour la Contraception, Paris
L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêt pour cet article
RÉFÉRENCES
1. Comparing contraceptive effectiveness of DIU and SIU. Heinemann H et all. Berlin. Contraception 91 (2015) 280-283
2. Contraception : Your questions answered, 6th Edition, 2013 ; Guillebaud J.
3. Prophylactic ibuprofen does not improve pain with IUD insertion. Bednarek P. et all. Contraception 91(2015) 193-197
4. RCP/CNGOF_2013
5. Use IUD and subsequent fertility. Follow up after participation in a randomized clinical trial. Hov G. et all. Contraception 75 (2007) 88-72
6. Risk of uterine perforation with SIU et DIU in the Euras study. Contraception 91 (2015) 274-279
Article paru dans le Genesis N°188 (février/mars 2016)
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